Le Jeu de Lutte au Baton et le sport Mas-Wrestling
Guy Jaouen
Independent Researcher and Author in Sport Anthropology (France)
President of ITSGA – Global platform for Traditional Sports & Games
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Introduction
Dans la plupart des pays, les monuments nous ont laissé des traces matérielles de coutumes et pratiques immatérielles anciennes. En Europe, ce côté immatériel de la culture vivante a souvent été reproduit sur les monuments religieux, en particulier les églises. Pour ceux qui savent les interpréter, ces représentations sont comme des photographies du passé qui nous transmettent des images de pratiques populaires contemporaines de l’époque de leur construction.
Tout d’abord il est nécessaire de connaître le contexte général de ces représentations. Ainsi, en France où j’habite, avant la révolution de 1789 l’église (Le mot église provient du grec ekklêsia, qui signifie ‘assemblée’) du village était symboliquement le bâtiment auquel la Communauté s’identifiait. Au début du Moyen Age, c’était souvent le seul bâtiment en pierre du village. Elle servait de refuge en cas d’attaque. Elle servait de tribunal lors des procès, et elle servait même parfois de marché couvert avant la construction des halles alimentaires. Dans les bâtiments religieux de l’Ouest européen, des scènes montrant de nombreuses pratiques populaires sont à découvrir sur les sablières (Poutre maîtresse placée sur les murs d’enceinte et supportant la charpente ), les miséricordes (Les miséricordes se trouvent au dessous des sièges pliants des stalles que l’on voit dans les ‘cœurs’ des cathédrales ou collégiales ), les bas-reliefs des portails ou des tympans (Partie sculptée au dessus du portail principal des églises ). Les deux premières sont à l’intérieur et sont en bois, les deux dernières en pierre car exposées aux intempéries.
Alors qu’aujourd’hui on oppose souvent le profane et le sacré, c'est-à-dire l’espace sociétal non religieux et celui religieux, nous devons savoir que ces deux côtés de la vie étaient fortement imbriqués jusqu’à la révolution industrielle des différents pays européens, et que cela se retrouve dans l’art des bâtiments religieux. Cela est toujours vérifiable dans l’Ouest de l’Europe où les bâtiments religieux vieux de plusieurs siècles sont très communs. A l’époque ces bâtiments étaient techniquement et culturellement les rares édifices ou l’Art pouvait s’exprimer pour la postérité car leur édification était ordonnée par le pouvoir temporel (Les rois et seigneurs) et celui spirituel (L’Eglise et l’institution religieuse). Des budgets très importants étaient donc assemblés pour construire ces édifices, ce qui permettait de faire intervenir des spécialistes de très nombreux corps de métiers.
Ainsi, pour la construction des Cathédrales et grandes églises, ces artisans et architectes voyageaient d’un grand chantier à l’autre dès la fin de l’Europe médiévale (Du 11ème siècle au 17ème siècle principalement pour les cathédrales ). La hiérarchie épiscopale de l’Eglise surveillait de très près la symbolique des œuvres. Il y avait la partie non négociable, le sacré, et la partie un peu plus libre qui offre encore aujourd’hui comme des clichés photographies de l’époque. C’était en quelque sorte la présence du laïque dans le religieux. Cependant, même dans les scènes religieuses commandées par l’Eglise et censées représenter les scènes connues de la Bible, les artisans sculpteurs de cette époque ne pouvaient que mettre en pratique leurs connaissances liées à leur ‘habitus’, c'est-à-dire celui lié à leur environnement social et culturel habituel. C’est ainsi qu’on peut voir, dans des scènes identiques, des personnages habillés avec des habits différents, contemporains de l’époque de la construction, c'est-à-dire avec une teinte d’inspiration locale.
Le Moyen Age
Le Moyen Age Européen est une époque où il y eut d’effroyables épidémies de maladie qui rendirent très aléatoire la destinée humaine, créant aussi une certaine égalité devant la mort. De nos jours on peut toujours sentir cette atmosphère pesante qui devait régner lors des offices religieux en découvrant les danses macabres dans certaines églises. C’est aussi des inscriptions ou des sculptures macabres qui accueillent les fidèles à l’entrée de ces bâtiments. Le fatalisme était alors le sentiment dominant. La vie semblait figée et l'acceptation de la situation présente était ressentie comme un fait voulu par Dieu. Il n'était pas de mode ni de bon ton de louer la joie de vivre, et c'était au contraire les souffrances et le désespoir qui étaient mis en avant pour mieux atteindre le paradis. Les plaisirs et divertissements représentés dans les édifices religieux sont donc souvent montrés sous un aspect coupable ou austère. Il n’était par ailleurs pas question de montrer des loisirs qu’on appelle ‘sportifs’ aujourd’hui, car cette notion est totalement absente de la mentalité de l’époque.
Cathédrale de Tudela (Navarre, Espagne. Détail du tympan, vers 1200, entrée principale). A l’entrée de la cathédrale, le tympan offre à gauche des images du bonheur à travers une obéissance aux consignes de l’église. A droite, ce sont des scènes d’horreur, avec des démons qui jettent les pénitents dans le feu de l’enfer (photo).
Cependant le Moyen Age avait aussi besoin de fortes soupapes de décompression sociales pour évacuer le trop plein de pessimisme, de rancœurs par rapport aux difficultés quotidiennes, de manque d'esprit de progrès ou de projection dans un lendemain qui fait peur. Puisque la réalité est si misérable, la fête est alors une échappatoire, une évasion, un refuge dans un ‘temps séparé’ (Non lié à la vie ordinaire ). C’est dans la fête que les jeux s’expriment librement. C’est là que le peuple mime les puissants, copient leurs jeux, leur musique et leurs danses. Ils jouent le temps de quelques heures ou quelques jours le rôle d’un autre eux-mêmes. Ce sont donc des jeux où ceux qui les interprètent s’approprient un autre statut, comme une requête pour un affranchissement de certaines restrictions imposées par la société, avec sans doute un esprit d’auto-libération.
Avec la Renaissance qui naquit d’un nouvel état d’esprit et d’une évolution technologique de la société, notamment au niveau militaire, les anciennes activités martiales réservées aux hommes d’armes et à l’élite perdirent leur statut et tombèrent petit à petit dans le cercle des pratiques populaires. La fonction sociale de ces jeux changea, subissant des aménagements, des réinventions, mais leur logique interne fut conservée. Ainsi les armes démodées sont devenues des jeux sportifs ou des jouets. La quintaine des chevaliers devint jeu de la quintaine, jeu de l’anneau ou joutes nautiques. L’épée devint un bâton appelé short stick (L’escrime au bâton fut discipline Olympique en 1904 aux jeux de St Louis - USA) en Angleterre ou Garotte aux Iles Canaries, tandis que d’autres bâtons gardaient une fonction martiale, comme le Shillelagh irlandais. La lutte qui était auparavant un indispensable complément aux combats corps à corps avec armes blanches devint un jeu sportif avec un statut élevé, le vainqueur étant parfois dispensé de corvées pendant une année comme après la désignation du « Roi du Papegaut » ancienne fête organisée afin d’entraîner les habitants au maniement des arcs et arbalètes pour la défense de leur cité.
Le cas de la lutte au bâton semble plus complexe, même si le bâton a toujours été le symbole du pouvoir et que ses représentations peuvent donc être vues sous l’angle de conflits symboliques. Le bâton, c’est le sceptre du Souverain, la canne de l’Evêque, le bâton de Maréchal, l’épée de l’homme armé, le bâton du paysan qui mène son troupeau, etc. Arracher un bâton des mains d’une personne, ou tout ce qui s’en approche, peut donc être considéré comme une action pour s’approprier son pouvoir symbolique. Ceci se retrouve dans les scènes existant dans les églises qui sont interprétées soit comme lutte de pouvoir entre le manant et le seigneur, paysans propriétaires et nobles, entre le laïque et l’ecclésiastique ou entre l’homme et la femme.
Une recherche plus importante reste à effectuer autour de ce jeu pour déterminer de façon plus approfondie comment il est arrivé jusqu’à nous dans les différentes régions du monde où il est de tradition culturelle.
Combat des anges - Miséricorde cathédrale St Ours (Construction vers l’an 1000) (vers 1480, Aoste – Italie)
Lutte au Bâton
Il est probable que le jeu de la ‘lutte au bâton’ était aussi une pratique populaire bien réelle, et la mode artistique de l’époque n’a fait que s’inspirer d’une activité vivante pour donner un sens à ces scènes liées à la fois au Profane et au Sacré. Les Jeux sont alors des activités en prolongement de la vie habituelle, et non pas des activités ‘séparées’, hors du temps, comme c’est aujourd’hui le cas dans le Sport où les gens s’exercent dans une pratique complètement étrangère à leur habitudes journalières.
Miniature du manuscrit de Botlean – Brittish Museum - 1338
Si nous prenons la Bretagne où j’habite, nous pouvons toujours voir de nombreux exemples de ce jeu de ‘lutte’ ou de ‘l’arraché du bâton’. C’est le cas sur une sablière de l’église de la Roche Maurice, à côté de Brest (1540). C’est encore le cas sur une sablière de la chapelle Saint Sébastien au Faouët (fin du 15ème siècle) où la scène montre un paysan et un noble luttant pour s’arracher un bâton. Il y a également une scène apparaissant sur l’angle d’une maison à Malestroit (15ème siècle, Morbihan) où l’interprétation locale dit que c’est une scène de ménage entre un bourgeois et sa femme qui tentent de s’emparer du bâton représentant le pouvoir.
Sablière de la chapelle Saint Sébastien au Faouët. Paysan et noble (L = 2,5 m).
Comme nous l’avons dit, de nombreuses scènes de ‘lutte au bâton vont dans ce sens d’une lutte pour le pouvoir. D’autres représentations existent, comme la miséricorde de l’église St Salvador à Bruges (1430, Flandre, Belgique), celle de l’Abbaye Saint-Lucien de Beauvais, France (1470). C’est également le cas à la cathédrale St Bertrand de Comminges, dans les Pyrénées, en France (1530). Nous y voyons une sculpture sur un bras de stalle (les sièges) où deux ‘fous’ (Au Moyen Age les fous sont considérés comme des personnages de distraction, non sérieux) se disputent un bâton de commandement, symbolisant un conflit entre les autorités principales qui se disputaient à cette époque le pouvoir sur le territoire en question. Il y a aussi celle de la Cathédrale de Zamora (16ème siècle, Espagne), ou encore celle de la Cathédrale de Ciudad Rodrigo (Castille, Espagne, 16ème), qui montrent bien que cette pratique était bien connue à la fin du Moyen Age, et sans doute bien avant.
Bras de stalle de la cathédrale St Bertrand de Comminges.
Cathédrale de Zamora
Ci-dessus, la représentation de la Cathédrale de Zamora, au Nord de Salamanque, semble mettre en prise une femme à gauche, et un homme à droite. Dans la Cathédrale de Ciudad Rodrigo, près de Salamanque, en Castille (16ème siècle), une autre miséricorde semble représenter une lutte entre un ecclésiastique et un laïque, représentation encore symbolique de conflits pour le pouvoir.
En Bretagne française, ce jeu est devenu le Bazh Yod, nom connu depuis au moins 150 ans et qui signifie « bâton à bouillie », car c’était souvent le bâton utilisé pour mélanger la bouillie d’avoine, plat habituel des paysans ordinaires, et qui était utilisé pour ce jeu. Ce jeu, comme d’autres jeux athlétiques traditionnels, a connu un processus de sportification dans les années 1970 et est aujourd’hui géré par une petite fédération. Des processus similaires ont sans doute été mis en place dans d’autres pays, comme par exemple en Yakoutie, ce qui a abouti au début des années 2000 à la reconnaissance de l’ancien jeu des Yakoutes par le comité national des sports de Russie. Des compétitions nationales de sports traditionnels, incluant ce jeu de lutte au bâton furent alors organisées dans les différentes régions de Russie. Puis le jeu a été promu au niveau international et est véhiculé aujourd’hui sous le nom de ‘Mas-wrestling’.
Techniques du jeu
Il n’y a pas mille manières de tirer un adversaire qui retient un bâton, cependant nous savons que les règles qui régissent les différents jeux peuvent être parfois différentes, modelées par la coutume locale. On peut également voir que ce jeu est toujours vivant dans des zones géographiques bien précises : montagnes, péninsules, îles, régions très froides, ce qui a sans doute préservé la pratique.
En Bretagne (France) – Bazh yod : Les deux joueurs sont assis face à face, les pieds calés contre une grosse planche fixée champ contre sol. Ils se saisissent d’un bâton de 50-60 cm de long pour un diamètre de 35-40 mm. Les mains sont placées au centre ou à l’extérieur, alternativement. Le but est de tirer l’autre joueur à soi ou de lui arracher le bâton. Il est interdit de déplacer les pieds sur la planche. Aujourd’hui il existe trois catégories de poids : - 80 kg, -100 kg et au-dessus.
Le jeu de vazh-a-benn (le bâton par le bout) est également pratiqué dans le Nord de la région. Chaque tireur est d’abord porté par quatre partenaires qui les tiennent par les épaules et les jambes. Puis les tireurs prennent dans un bâton cylindrique, chacun par les deux mains dans un bout. Le bâton est donc positionné dans un sens longitudinal aux joueurs au lieu d’être perpendiculaire. Le but est d’arracher le bâton des mains de l’autre tireur.
Le Touseg (jeu du crapaud) était une variante du vazh-a-benn, avec une prise de main différente, plus forte.
Jeu du Bazh-Yod
En Aragon – Tiro el palo : La pièce de bois servant à tirer l’adversaire est différente entre le Haut et le Bas Aragon (montagne et plaine). Dans le Haut Aragon, le bâton est un simple cylindre de bois, comme en Bretagne. Les pieds sont contre pieds. Dans le Bas Aragon (Sarragosse), le bâton ressemble un peu au Touseg, un des bâtons utilisés en Bretagne française. Il est constitué de deux cylindres parallèles reliés par trois pièces de bois, le tout ressemblant à un cadre rectangulaire.
L’instrument utilisé dans le bas-Aragon
Aux Asturies – tiru al palu : Les Asturies ont organisé des festivals de jeux traditionnels dans les années 1990, et le tiru del palu en faisait partie, pratiqué par les hommes comme par les femmes. Le bâton mesure 50-60 cm de long. Ces jeux étaient auparavant surtout pratiqués dans les romerias, ou fêtes paroissiales.
Tiru al palu
Aux Iles Canaries – pulso del pastor : L’exercice consiste à déstabiliser l’adversaire en le tirant à soi pour l’obliger à se redresser, ou en lui arrachant le bâton. Les pieds sont placés face à face, talon contre talon. C’est un jeu surtout pratiqué par les bergers.
Pulso del pastor
En Hongrie – bot-birkózás : Les joueurs s’assoient pieds contre pieds et tentent d’arracher le bâton ou de tirer l’adversaire, mais d’autres variantes existent, comme en essayant d’arracher le bâton dans une sorte de lutte, en étant debout et sans sortir d’un cercle tracé sur le sol.
Chez les Inuits du Canada - eskimo stick pull : Ce jeu est organisé lors des rassemblements de jeux indigènes comme les « jeux de l’Arctique » ou les North American Indigenous Games. Les deux concurrents sont assis, pieds contre pieds, jambes légèrement fléchies. Les mains sont tour à tour au milieu, puis aux extrémités du bâton. Les mains doivent toutes se toucher. Le but est d’arracher le bâton ou de lever l’adversaire. Les concurrents changent de côté après chaque manche, ainsi que de position des mains. La position est celle utilisée par les pêcheurs pour sortir un phoque d’un trou dans la glace, le phoque étant tiré par un fil enroulé sur un bâton cylindrique.
Aux USA – cane pulling : Un jeu appelé pull stick était déjà expliqué au début du 20ème siècle dans la MacFadden’s Encyclopedia of Physical Culture, dont le volume deux est un exposé d’exercices pour la santé et la forme physique (Fitness – voir photo). La position des pieds est bouts des pieds contre bouts des pieds, dos droit et donc jambes fléchies. Aujourd’hui, cet exercice s’appelle cane pulling dans les salles de remise en forme. Un jeu similaire, nommé stick wrestle (lutte au bâton) est également utilisé. Le but y est de faire toucher le bout du bâton sur le côté droit du joueur, ce qui impose un travail musculaire différent.
Photo de l’Encyclopédie MacFadden
En Islande – skinndráttur : Dans ce jeu les concurrents n’utilisent pas un bâton, mais une peau de bête, bien plus facile à trouver qu’une branche d’arbre dans ce pays de l’extrême Nord. La position est toujours assise, pieds contre pieds, les mains prenant dans la fourrure.
En Estonie - vagikaika vedamine : Cette expression signifie « tirer le bâton » en estonien. Les deux joueurs sont assis l’un en face de l’autre, pieds contre pieds, et prennent des deux mains dans les bouts opposés d’un bâton. Au signal ils essayent de l’arracher des mains de l’autre, ou de tirer l’adversaire. Le jeu est donc similaire au vazh a benn breton où le bâton est pris de la même façon, mais où les deux adversaires sont portés par des équipiers.
En péninsule du Yamal, Russie : Le peuple Yamal sont des Nenets qui habitent dans la péninsule du Yamal, au Sud de la mer de Kara, depuis une période très ancienne. Ils y vivent depuis au moins mille ans comme gardiens de troupeau de rennes, puis d’une activité pastorale depuis les 17ème ou 18ème siècles. C’est une des rares peuplades qui continue à vivre de façon traditionnelle malgré la planification moderne (soviétique), se déplaçant en traîneaux avec des rennes, habitant dans des tipis, vivant en dehors des terres et conservant leurs propres divinités. Les saisons rythment toujours leur vie et la nature leur fournit leurs besoins matériels. Cependant la découverte récente d’immenses gisements de gaz a commencé de changer leur mode de vie. La lutte au bâton y est populaire et ils utilisent une planche pour bloquer leurs pieds.
Lutte au bâton chez les Nenets
Yakoutie, Russie - Tugging the stick : La Yakoutie se situe presque à l’extrême Nord Est de la Sibérie. Comme chez les eskimos du Canada, depuis 1995 une rencontre sportive nationale est organisée, également appelée compétition Nordique multidisciplinaire. Des épreuves par équipe, avec trois garçons, sont organisées : Course avec un bâton sur 3 km ; sauter par-dessus des traîneaux à pied joint ; lancer un lasso ; lancer une hache ; triple saut ordinaire. L’événement comporte aussi deux épreuves individuelles : la lutte Khapsagai et tugging the stick (en anglais). Ce sport est maintenant bien structuré et les catégories de poids sont -50 kg, -60 kg, -70 kg et +70 kg. Les compétiteurs sont éliminés après deux défaites.
Règles d’organisation pour tugging the stick :
1 La rencontre est organisée sur un plancher de bois de 4m x 4m.
2 La planche pour placer les pieds mesure 2 m de long, 24 cm de hauteur et ne peut faire moins de 5 cm d’épaisseur. Le bord du dessus est arrondi et la planche est solidement fixée.
3 Le bâton doit être cylindrique, taillé dans du mélèze ou du bouleau et mesurer 50 cm de long pour 3,2 à 3,4 cm de diamètre.
4 Les participants s’assoient l’un en face de l’autre, pieds calés contre la planche. Ils prennent le bâton les deux mains à l’extérieur ou à l’intérieur, en positions inversées. L'intervalle entre les mains ne doit pas dépasser 1 cm, sans superposition.
5 La lutte commence au coup de sifflet de l’arbitre. Après chaque manche un temps de repos de minimum 15 s et maximum 2 min est accordé. Pendant le « combat » il est interdit de changer de position de mains, de parler à l’arbitre et de s’aider de la planche ou d’un doigt de pied pour bloquer le bâton.
Péninsule du Kamchatka, Russie : Les études réalisées par Waldemar Jochelson au début du 20ème siècle nous ont laissé des preuves que le peuple des Koriaks connaissait le jeu de la lutte au bâton. Cette péninsule est située au bas de l’extrême Nord-Est Sibérien, à droite de l’île de Sakhaline. On y retrouve les mêmes pratiques que chez les Inuits ou d’autres populations eskimos, comme le tirer par la nuque et la lutte en tirant sur une fourrure.
Croquis de Jochelson
Russie et international – Maswrestling : Depuis le début des années 2000 la lutte au bâton est un sport reconnu par le comité national des sports de Russie, avec des compétitions nationales à Moscou, comme quelques autres sports traditionnels qui se sont imposés depuis la chute de l’Empire soviétique. Mas-wrestling est le nom américanisé que la fédération de lutte au bâton a donné au nouveau sport. Mas signifie bâton en langue Yakoute, et wrestling la lutte en anglais. Cette américanisation du nom est sans doute liée à la transformation du jeu en sport avec l’idée de lui donner une image moderne afin d’impulser un développement international. Les règles sont inspirées de celles de Yakoutie. Cette situation montre donc une nouvelle fois un choix paradoxal où la promotion d’un sport traditionnel au niveau international signifie qu’on ne conserve que sa logique interne (les règles) et que sa logique externe (le contexte culturel) est soit folklorisé, soit ignoré. Le jeu et la culture de la communauté sont oubliés pour ne garder que la recherche de performance, avec toutes les dérives possible.
Compétition de Mas-wrestling